Les trésors de la SIMEsquisses Théodore Géricault

Parmi les collections patrimoniales de la Bibliothèque municipale de Mulhouse figure la collection de dessins anciens édifiée par la Société industrielle de Mulhouse entre 1880 et 1883. L’un d’eux nous interpelle en particulier, « Esquisses (plume et crayon) » attribué à Théodore Géricault (1791-1824), célèbre peintre romantique du Radeau de La Méduse.
Si la technique – composite – est indiquée, le sujet n’est pas même suggéré. Or c’est justement le sujet de ce dessin qui le rend intéressant. Qu’y voit-on représenté au juste ?
D’un côté un robuste cheval figuré de trois-quarts dos, monté par un cavalier à peine esquissé, témoigne de la passion de Géricault pour le cheval. Engagé en 1814 dans les Mousquetaires du roi, il n’a cessé d’explorer l’anatomie, le mouvement, l’expressivité et les émotions de l’animal, du champ de bataille à l’écurie. De l’autre côté un homme adossé à une chaise dessinant d’un geste sûr. Il est très tentant de considérer cette esquisse à l’encre brune comme un auto-portrait de Géricault, mais plus encore comme une mise en abîme du travail d’observation que suppose sa pratique artistique. Et nous aurions, en prime, l’exemple sur cette même oeuvre de ce que l’artiste a pu croquer. À moins qu’il ne s’agisse de la coexistence fortuite de deux croquis sans rapport direct sur un même feuillet (du reste dessiné recto et verso, avec d’autres motifs d’un tout autre registre esquissés au crayon).
Si la technique – composite – est indiquée, le sujet n’est pas même suggéré. Or c’est justement le sujet de ce dessin qui le rend intéressant. Qu’y voit-on représenté au juste ?
D’un côté un robuste cheval figuré de trois-quarts dos, monté par un cavalier à peine esquissé, témoigne de la passion de Géricault pour le cheval. Engagé en 1814 dans les Mousquetaires du roi, il n’a cessé d’explorer l’anatomie, le mouvement, l’expressivité et les émotions de l’animal, du champ de bataille à l’écurie. De l’autre côté un homme adossé à une chaise dessinant d’un geste sûr. Il est très tentant de considérer cette esquisse à l’encre brune comme un auto-portrait de Géricault, mais plus encore comme une mise en abîme du travail d’observation que suppose sa pratique artistique. Et nous aurions, en prime, l’exemple sur cette même oeuvre de ce que l’artiste a pu croquer. À moins qu’il ne s’agisse de la coexistence fortuite de deux croquis sans rapport direct sur un même feuillet (du reste dessiné recto et verso, avec d’autres motifs d’un tout autre registre esquissés au crayon).
Ce qui semble à peu près certain en revanche c’est que l’esquisse de cheval est directement reprise dans une composition de Géricault éditée sous forme de lithographie en 1821 sous le titre « Horses going to a fair », littéralement « Chevaux menés à une foire », imprimée à Londres par Charles Hullmandel, soit le principal concurrent en Angleterre de l’imprimeur-lithographe mulhousien Godefroi Engelmann.
Les cabinets des estampes de Strasbourg et de Mulhouse conservent d’ailleurs une partie des planches imprimées par Engelmann pour les recueils lithographiés Etudes de chevaux par Géricault (Paris : Gihaut, 1822) et Etudes de chevaux d’après nature (Paris : G. Engelmann, vers 1822), preuves au passage de l’intérêt « éditorial » de ces compositions équestres dont Géricault s’était fait une spécialité.
Le dessin « d’après nature » peut également révéler une dimension sociale comme dans notre dessin : ni cheval lancé dans la bataille, ni cheval de course monté par un jockey, Géricault représente ici un cheval de trait conduit avec d’autres sur une foire pour y être vendu. Il est une marchandise et un revenu en puissance. « Loin d’être un simple motif, l’obsession équestre de Théodore Géricault soulève de nombreuses questions transversales : géographiques, économiques, politiques, militaires et sociales. Suivre, observer, scruter ses chevaux est assurément un moyen formidable de comprendre les profondes évolutions de la société napoléonienne vers la révolution industrielle – le passage du cheval militaire au cheval prolétaire… » (Bruno Chenique et Gaëlle Rio, Les Chevaux de Géricault, catalogue de l’exposition du Musée de la Vie romantique, 2024).
Les anciens propriétaires de ce dessin n’étaient pas, eux, des prolétaires puisque ce dernier porte dans le coin inférieur gauche le chiffre du marquis de Chennevières. Philippe de Chennevières (1820-1899) l’un des plus grands collectionneurs d’art ancien au XIXe siècle. Actif conservateur d’art moderne, il opérait au Luxembourg et dans les Salons et se trouva lié à la plupart des artistes et personnalités du monde de l’art sous le Second Empire avant d’être nommé directeur des Beaux-Arts (1874 à 1878). Le dessin fut sans doute acquis par la suite par un industriel mulhousien (possiblement Charles Steinbach) qui en fit don à la Société industrielle pour le Musée des Beaux-Arts, où il fut sans doute exposé et observé par beaucoup de curieux.
Une notice rédigée par les équipes des Bibliothèques de Mulhouse.
Pour aller plus loin :
Catalogue des dessins de la collection du marquis de Chennevières-Pointel, inspecteur des musées de province, exposés au musée d’Alençon. Paris, Poulet-Malassis et de Broise, 1857
Bruno Chenique, Les Chevaux de Géricault (Paris : Inter-Livres-Bibliothèque de l’image, 2007)
Bruno Chenique et Gaëlle Rio (dir.), Les Chevaux de Géricault (Paris : Musées de Paris, 2024), catalogue de l’exposition éponyme présentée par le Musée de la Vie romantique de mai à septembre 2024 à l’occasion du bicentenaire de la mort du peintre Théodore Géricault (1791-1824)